Suivi Pique-prune


Conservation d’Osmoderma eremita
Projet en coordination avec l’Office cantonal de l’agriculture et de la nature (OCAN)
État des lieux et actions de conservation

Contexte

Le Pique-Prune (Osmoderma eremita) est un gros coléoptère, très rare et protégé en Suisse. Dépendant des vieux feuillus, il vit dans les cavités remplies de bois en décomposition, où se développent ses larves sur plusieurs années. Cet habitat particulier est de plus en plus rare en raison de la disparition progressive des vieux arbres, souvent abattus pour des raisons de sécurité ou pour l’aménagement du territoire. L’espèce passe facilement inaperçue : les adultes sont discrets et peu mobiles, tandis que les autres signes de présence, comme les déjections, larves ou cadavres, ne sont observés que lors d’abattages et nécessitent une expertise pour être correctement identifiés.

À Genève, l’espèce n’est connue que de quelques stations pour la période récente, à chaque fois à la suite de la chute ou d’abattages d’arbres ayant mis à jour la cavité à terreau. Pour vérifier l’occupation des secteurs connus, des gîtes artificiels ont été installés dans certains sites où des traces de présence avaient été relevées. Ces gîtes offrent surtout un habitat alternatif en cas d’abattage d’arbres-habitats tout en permettant de confirmer la présence active de l’espèce.

Malgré ces efforts, le Pique-Prune reste difficile à détecter, et les indices relevés jusqu’ici sont souvent ponctuels, risquant de donner une vision incomplète de sa répartition réelle. Pour affiner les connaissances sur l’espèce et mieux orienter les actions de conservation, des techniques innovantes, comme l’utilisation de chiens de détection, ont pu être déployées pour localiser plus précisément les arbres colonisés.

Méthode

L’utilisation de chiens est une approche innovante pour la détection d’insectes menacés, bien qu’elle reste marginale en raison du faible nombre de spécialistes existants. Les animaux sont spécialement entraînés à repérer différentes odeurs de travail, et notamment celle caractéristique dégagée par le Pique-Prune. Cette méthode offre plusieurs avantages :

  • Efficacité accrue : les chiens peuvent détecter des cavités colonisées même quand elles sont inaccessibles à l’homme ;
  • Rapidité des prospections : cette méthode permet de couvrir de vastes zones en un temps limité pour identifier les zones d’intérêt ;
  • Préservation des habitats : contrairement à d’autres méthodes, elle ne nécessite pas d’intervention invasive (ouverture des cavités, inspection du terreau).

Deux limitations principales sont cependant à souligner :

  • Signalement diffus : les chiens détectent parfois des odeurs diffuses, ce qui complique la localisation précise des arbres colonisés. Cela arrive lorsque plusieurs arbres adjacents sont occupés, ou en cas de vent ou de thermiques brouillant les pistes olfactives ;
  • Absence de temporalité : les chiens ne distinguent pas une colonisation récente d’une odeur ancienne issue de déjections ou restes accumulés. Les signalements des chiens nécessitent alors une validation complémentaire, comme l’usage de dispositifs attractifs.

Résultats et perspectives

En 2024, plus de 530 arbres ont été inspectés, principalement des chênes, mais aussi des platanes et des châtaigners, à travers sept secteurs prioritaires. Les prospections ont confirmé la colonisation de 191 arbres, avec 51 arbres supplémentaires considérés comme probablement occupés. Plusieurs zones clefs ont été confirmées sur les communes de Chêne-Bougeries, Cologny, Vandœuvres, Meyrin et Bardonnex.

En 2025, des dispositifs attractifs à phéromones, non létaux, seront déployés pour compléter les détections, en parallèle des efforts de marquage et de gestion des vieux arbres pour protéger ces habitats essentiels.

Un chien de détection marquant un arbre colonisé par Osmoderma eremita dans le secteur de Conches (Chêne-Bougeries).