Lépidoptères


Les Lépidoptères constituent un groupe d’insectes dont les adultes, appelés papillons, se reconnaissent à leurs deux paires d’ailes recouvertes d’écailles. Les larves, appelées chenilles, portent 3 paires de pattes sur le thorax, et au plus 5 paires de fausses pattes abdominales.

Écologie

Les Lépidoptères occupent tous les milieux terrestres, quelques rares espèces seulement ayant des larves se développant dans le milieu aquatique. Les chenilles sont presque toujours phytophages, se nourrissant des feuilles, des bourgeons, des tiges et des racines de toute sorte de plantes. Les adultes se nourrissent essentiellement de sécrétions de végétaux, et contribuent à leur pollinisation (Anderson et al., 2023).

Diversité locale

Près de 2 000 espèces de Lépidoptères sont recensées dans la région genevoise (Andriollo et al., 2019). Seuls 120 Rhopalocères ou « papillons de jour » volent dans le bassin genevois ; ils sont globalement très bien étudiés. Plus de 1 800 espèces sont donc des « papillons de nuit », divisés en deux grands groupes informels comptant chacun près d’un millier d’espèces : les macrohétérocères (généralement de grande taille) et les microlépidoptères (généralement de taille modeste, voire minuscules). Tous restent encore relativement mal connus, notamment les microlépidoptères dont plus de 500 espèces restent probablement à être trouvées dans la région (Landry, 2013).

Les familles les plus diversifiées incluent les géomètres (Geometridae), les noctuelles (Noctuidae), les tordeuses (Tortricidae) et les pyrales (Pyralidae) au sens large : ces familles totalisent plus d’un millier d’espèces à elles seules, le reste des Lépidoptères se répartissant dans plus d’une soixantaine d’autres.

Tordeuse de l’œillet Olethreutes arcuella (Tortricidae)
CC-BY Polyakov Alexander

Moro-sphinx Macroglossum stellatarum (Sphingidae)
CC-0 ruebezahl
Pyrale pourprée Pyrausta purpuralis (Pyralidae)
CC-0 Tobias Schonberg

Menaces et protection

Des listes rouges exhaustives existent pour tous les Rhopalocères et pour les Zygènes au niveau suisse et rhônalpin (Wermeille et al., 2014 ; Flavia APE, 2018). Parmi les espèces de papillons de jour hautement prioritaires au niveau suisse, on trouve historiquement dans la région genevoise l’Hespérie des Cirses Pyrgus cirsii (plus observé depuis 2006), l’Azuré de la Chevrette Cupido osiris (plus observé depuis 1971), l’Azuré des paluds Maculinea nausithous (plus observé depuis 2001), l’Azuré de la Sanguisorbe Maculinea teleius et la Bacchante Lopinga achine. D’autres espèces en danger se trouvent également dans la région comme le Procris du Prunier Rhagades pruni, l’Hespérie du Chiendent Thymelicus acteon, l’Azuré des Coronilles Plebejus argyrognomon, la Thécla de l’Amarel Satyrium acaciae, la Thécla de l’Yeuse Satyrium ilicis et le Sylvain azuré Limenitis reducta. La préservation des prairies et des petites structures qui s’y trouvent est notamment identifiée comme un élément majeur pour la sauvegarde des papillons de jour. Une synthèse des menaces et des bons gestes à adopter est disponible sur lepido.ch.

Seules quelques familles de papillons de nuit de grande taille ont fait l’objet d’évaluation au niveau suisse. Parmi les espèces hautement prioritaires en Suisse présentes dans le bassin genevois on recense la Sésie de la Bugrane Bembecia albanensis, la Laineuse du Prunelier Eriogaster catax, la Feuille-morte du Peuplier Gastropacha populifolia, la Turquoise des Chardons Jordanita notata, l’Écaille striée Spiris striata et la Nudarie vieille Thumatha senex. D’autres espèces (comme le Bombyx des buissons Lemonia dumi ou la Soucieuse Orgyia recens) sont historiquement connues du canton mais n’ont pas pu être retrouvées dans les dernières décennies.

Hespérie des Cirses Pyrgus cirsii (Hesperiidae)
CC-0 Gilles San Martin

Bacchante Lopinga achinei (Nymphalidae)
CC-0 Nicolás Tamargo
Laineuse du Prunelier Eriogaster catax (Lasiocampidae)
CC-BY Samuel Guiraudou

Étude des Lépidoptères

Méthodes

L’étude des Lépidoptères est relativement abordable pour de nombreuses familles aux espèces de taille raisonnable, bien que de nombreux groupes nécessitent la collecte et/ou la dissection pour une identification précise et fiable. Les prospections peuvent concerner les adultes comme les chenilles.

Du fait de leurs mœurs diurnes, les Rhopalocères s’observent facilement dans le milieu naturel, quand ils s’activent dans la végétation. Quelques trucs et astuces pour préparer une sortie d’observation sont donnés sur lepido.ch. Certains Hétérocères (« papillons de nuit ») sont également actifs de jour, mais il s’agit d’une minorité d’espèces. L’observation des papillons de nuit se passe donc plus souvent nuitamment, à l’aide d’une méthode d’attraction, typiquement en recourant à des pièges lumineux. En journée, on peut aussi trouver quelques espèces autour d’éclairages extérieurs les ayant attirés la nuit précédente, ou chercher certaines chenilles dans la végétation. Des prospections plus ciblées à l’aide de phéromones ou de fruits fermentés (« miellée ») peuvent être effectuées pour plusieurs groupes de Lépidoptères, diurnes comme nocturnes. Plusieurs ressources permettant l’identification des papillons (et notamment les Hétérocères) sont listées ci-dessous ; en ligne, le site Lepiforum.de offre une collection photographique riche et structurée pour identifier adultes et chenilles.

Dans le bassin genevois

L’étude des Lépidoptères a une longue tradition dans le bassin genevois, la Société Lépidoptérologique de Genève étant créée en 1905 avant de devenir l’actuelle Société entomologique de Genève dans les années 1940 (Meia, 2021). L’étude historique des papillons passant souvent par la constitution de collections privées par des passionnés, l’interdiction de la chasse sur le canton de Genève en 1974 met un frein aux prospections. Un « Catalogue des Lépidoptères du bassin genevois » est publié par la Société dans les années 1980. Les observations des papillons de jour continuent (bien que centrées sur le canton de Genève et insuffisantes sur le Jura ou le Salève) et permettent d’identifier une érosion nette des populations (Carron & Wermeille, 2009). Les papillons de nuit restent essentiellement délaissés jusqu’à la création en 2010 du projet Elpenor d’abord centré sur les macrohétérocères (Baumgart & Pastore, 2015). Les prospections continuent à ce jour (Guibert, 2020), avec le concours de l’Office cantonal de l’agriculture et de la nature (OCAN) et du Muséum d’histoire naturelle de Genève (MHNG).

Râtissée Habrosyne pyritoides (Drepanidae) au drap lors d’un piégeage lumineux.
CC-BY Tommy Andriollo

Vous avez observé une espèce d’intérêt ?

Transmettez vos données naturalistes sur les plateformes dédiées.

Ressources pour l’identification

Sites Web

Rennwald E. & Rodeland J. (depuis 2004). Lepiforum: Bestimmung von Schmetterlingen (Lepidoptera) und ihren Präimaginalstadien (www.lepiforum.de). [site en allemand très riche en photos et informations sur la plupart des groupes ; imagos mais aussi stades larvaires]

Baudraz M. & Baudraz V. (depuis 2011). lepido.ch : Papillons de Suisse (www.lepido.ch). [site très complet sur les papillons de jour et zygènes rouges]

Ouvrages en français

Baudraz M. & Baudraz V. (2021). Guide d’identification des papillons de jour de Suisse. info fauna, 224 pp. [pour les papillons de jour et zygènes rouges seulement]

Robineau R., Bachelard P., Bérard R., Colomb C., Demerges D., Doux Y., Fournier F., Gibeaux C., Maechler J., Schmit P. & Tautel C. (2007). Guide des papillons nocturnes de France. Delachaux et Niestlé, 287 pp. [pour les imagos ; en rupture de stock en 2023 – couvre les macrohétérocères]

Leraut P. (2006-2019). Papillons de nuit d’Europe. Série en 6 volumes, NAP Editions, Verrières le Buisson. [série d’ouvrages spécialisés sur les imagos]

Ouvrages en anglais

Fibiger M., Goater B. Hacker H., Hreblay M., Ronkay L., Steiner A., Witt T., Yela J.L. & Zilli A. (1990-2013). Noctuidae Europaeae. Série en 13 volumes, Entomological Press, Sorø. [série d’ouvrages spécialisés sur les imagos de noctuelles]

Razowski J. (2002-2003). Tortricidae (Lepidoptera) of Europe. Série en 2 volumes, František Slamka, Bratislava. [série d’ouvrages spécialisés sur les imagos de tordeuses]

Références

Anderson M., Rotheray E.L. & Mathews F. (2023). Marvellous moths! pollen deposition rate of bramble (Rubus futicosus L. agg.) is greater at night than day. PLoS ONE 18(3): e0281810.

Andriollo T., Landry B., Guibert B., Pastore M. & Baumgart P. (2019). Nouveaux ajouts à la liste des Lépidoptères du canton de Genève. Entomo Helvetica 12: 9–28.

Baumgart P. & Pastore M. (2019). Projet ELPENOR. Macrohétérocères du canton de Genève : pointage des espèces présentes : Résultats des prospections 2010-2015. Genève, 48 pp.

Carron G. & Wermeille E. (2009). Livre rouge des insectes du bassin genevois. Papillons de jour · Libellules · Orthoptères. Risques d’extinctions. Espèces prioritaires. Rapport scientifique pour l’État de Genève, Direction générale de la Nature et du Paysage, Genève, 50 pp.

Flavia APE (2018). Liste rouge des Rhopalocères et Zygènes de Rhône-Alpes. Flavia APE, Trept, 22 pp.

Guibert B. (2020). Elpenor – Rapport d’activités 2017-2020. Elpenor, groupe d’étude des papillons de nuit du canton de Genève, Genève, 20 pp.

Landry B. (2013). Vingt-et-un ajouts et une suppression à la Liste des Lépidoptères du Canton de Genève. Entomo Helvetica 6: 115–122.

Meia D. (2021). À la découverte des entomologistes genevois / Partie 1. MuséumDoc, le blog des bibliothèques et archives du Muséum de Genève.

Wermeille E., Chittaro Y. & Gonseth Y. (2014). Liste rouge Papillons diurnes et Zygènes. Espèces menacées en Suisse, état 2012. Office fédéral de l’environnement, Berne, et Centre Suisse de Cartographie de la Faune, Neuchâtel. L’environnement pratique no1403, 97 pp.