Annélides


Les Annélides regroupent des vers dont le corps apparaît comme une succession d’anneaux globalement identiques. Les vers de terre et les sangsues sont les représentants les plus classiques des deux grandes classes d’Annélides trouvées dans le bassin genevois : les Oligochètes et les Achètes.

Écologie

Les Oligochètes sont détritivores et la plupart ont un mode de vie fouisseur : ce sont les « vers de terre ». On les trouve dans le sol des milieux terrestres, dans les sédiments des milieux aquatiques (Juget, 1967) ou à l’interface entre ces deux milieux. Les vers de terre participent à la décomposition de la matière organique, à l’aération des sols et à l’augmentation de l’épaisseur de la couche arable. Ils sont généralement répartis en trois guildes écologiques : les épigés, vivant en surface sans creuser de galeries, les endogés, vivant dans des galeries essentiellement horizontales dans les premières dizaines de centimètres sous le sol, et les anéciques vivant dans des galeries verticales bien plus profondes.

Quelques espèces d’Oligochètes ont un mode de vie différent, comme les Branchiobdellides qui vivent sur les écrevisses (et consomment les micro-organismes et les détritus s’accumulant sur la carapace de leur hôte) ou certains vers aquatiques du genre Chaetogaster qui peuvent être prédateurs de micro-invertébrés.

Les Achètes, plus couramment appelés « sangsues », sont ectoparasites ou prédateurs. Les ectoparasites sont hématophages : ils se nourrissent du sang de toute sorte de Vertébrés (poissons, amphibiens, reptiles, oiseaux ou mammifères). On estime qu’un quart des espèces de sangsues sont prédatrices : elles consomment de petits vers, limaces et escargots, et des larves d’arthropodes. Toutes les sangsues de la région sont associées au milieu aquatique.

Diversité locale

La diversité locale est mal connue. Il est estimé que 225 espèces d’Oligochètes vivent en Suisse, dont une centaine seraient aquatiques (Forum Biodiversité Suisse, 2002). Dans le bassin genevois, 81 Oligochètes aquatiques sont recensés (Vivien & Lafont, 2015). Les Achètes sont mal connus et peu étudiés, c’est un groupe à la taxinomie difficile ; on recense 185 espèces de sangsues aquatiques dans le Paléarctique (Sket & Trontelj, 2008).

Aucun Polychète (un groupe essentiellement marin) n’est recensé dans le bassin genevois, mais certaines espèces comme l’invasive Hypania invalida, connue du Rhône voisin (Devin et al., 2006), pourraient un jour gagner la région. Les chiffres sur les Oligochètes incluent de minuscules vers de la famille des Aeolosomatidae (p. ex. Piguet, 1906), désormais placés parmi les Polychètes (mais en incertae sedis).

Lombric Lumbricus sp. (Lumbricidae)
CC-BY Christophe Quintin

Sangsue médicinale Hirudo medicinalis (Hirudinidae)
CC-BY ajott
Branchiobdellides indéterminés (Branchiobdellidae) sur une Écrevisse de torrent Austropotamobius torrentium (hors bassin genevois)
CC-BY David Sandler

Menaces et protection

Aucun travail n’est disponible concernant l’état de menace des Annélides dans le bassin genevois. La Sangsue officinale Hirudo medicinalis est considérée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) comme globalement « quasi-menacée » (Utevsky et al., 2014). Il s’agit du seul annélide européen disposant d’un statut de conservation.

Étude des Annélides

L’observation des Annélides du sol se fait par prélèvement du substrat, qui peut faire l’objet d’un tri manuel, de tamisage, ou d’une extraction par appareil de Berlese (typiquement pour les petits enchytréides). Les Oligochètes d’eau douce sont récupérés par tamisage de sédiment (Vivien & Lafont, 2015). Les sangsues peuvent être recherchées à vue, à l’aide d’un filet troubleau ou être piégées à l’aide d’appâts (Lecaplain & Noël, 2019).

Il est possible d’identifier certaines espèces de vers de terre par leur morphologie externe, sur des individus adultes, de préférence sexuellement matures et anesthésiés (Bouché, 1972). Les sangsues peuvent également pour certaines s’identifier à l’aide de caractères externes (Lecaplain & Noël, 2019). L’observation sur le terrain des individus vivants et la photographie est très utile pour observer certains caractères s’estompant chez les individus conservés en alcool. La dissection et l’analyse de l’anatomie interne restent cependant nécessaires pour certains groupes et les incertitudes taxinomiques justifient souvent la collecte de spécimens et l’examen au laboratoire. Les approches génétiques ouvrent également une voie prometteuse pour cet embranchement d’animaux présentant peu de caractères externes et une taxinomie incomplète et embrouillée. Les Oligochètes aquatiques font partie des groupes ciblés par de telles initiatives en Suisse, notamment dans le Léman (Vivien et al., 2017).

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Ressources pour l’identification

L’identification des Annélides est affaire de spécialistes, et la taxinomie du groupe nécessite toujours des travaux conséquents.

Oligochètes

Bouché M. (1972). Lombriciens de France. Institut national de la recherche agronomique, Paris, 671 pp. [identification (en français) des vers de terre de France]

Achètes

Ben Ahmed R. & d’Hondt J.L. (2009). Catalogue et clés tabulaires de détermination des Hirudinées d’eau douce de la faune Française. Bulletin de la Société zoologique de France 134(3-4): 263-298. [identification (en français) des sangsues de France ; incomplet mais bonne base]

Lecaplain B. & Noël F. (2019). Les sangsues d’eau douce du Nord-Ouest de la France (Annelida – Hirudinida). Normandie, Bretagne, Pays de la Loire. Recherche, récolte et identification. Gretia, 91 pp. [identification (en français) des sangsues du Nord-Ouest français ; richement illustré de photos]

Références

Bouché M. (1972). Lombriciens de France. Institut national de la recherche agronomique, Paris, 671 pp.

Devin S., Akopian M., Fruget J.F., di Michelle A. & Beisel J.N. (2006). First ecological observations in French hydrosystems of Hypania invalida, a freshwater Polychaeta which was recently introduced in Western Europe. Vie et Milieu 56(3): 247–254.

Forum Biodiversité Suisse (2002). Biodiversité et eaux douces. HOTSPOT 6/02: 1–24.

Juget J. (1967). Quelques données nouvelles sur les oligochètes du Léman : composition et origine du peuplement. Annales de Limnologie 3(2): 217–229.

Lecaplain B. & Noël F. (2019). Les sangsues d’eau douce du Nord-Ouest de la France (Annelida – Hirudinida). Normandie, Bretagne, Pays de la Loire. Recherche, récolte et identification. Gretia, 91 pp.

Piguet É. (1906). Oligochètes de la Suisse française. Revue suisse de Zoologie 14(2): 389-403.

Sket B. & Trontelj P. (2008). Global diversity of leeches (Hirudinea) in freshwater. Hydrobiologia 595(1): 129-137.

Utevsky S., Zagmajster M. & Trontelj P. (2014). European Medicinal Leech Hirudo medicinalis. The IUCN Red List of Threatened Species 2014: e.T10190A21415816.

Vivien R. & Lafont M. (2015). Note faunistique sur les oligochètes aquatiques de la région genevoise et de Suisse. Revue suisse de Zoologie 122(2): 207-212.

Vivien R., Holzmann M., Werner I., Pawlowski J., Lafont M. & Ferrari B.J.D. (2017). Cytochrome c oxidase barcodes for aquatic oligochaete identification: development of a Swiss reference database. PeerJ 5: e4122.